Le Temple dans Lorraine Actu

Découvrez l'article "À Metz, des habitants se battent pour sauver ce bâtiment historique menacé de destruction" écrit par Ninon Oget et paru dans Lorraine Actu le 8 mars 2024.

À Metz, des habitants se battent pour sauver ce bâtiment historique menacé de destruction

Le temple de Queuleu à Metz (Moselle) est vide depuis plusieurs années. Face à une menace de démolition de l'édifice en 2022, une association s'est créée pour le sauver.

Le Temple Neuf de Metz (Moselle) fait partie des monuments incontournables à découvrir dans le centre-ville.

Mais saviez-vous que sur les hauteurs du quartier Queuleu de Metz se trouvait un autre temple ? Anciennement dédié au culte protestant, l’édifice est aujourd’hui vide de toute activité. À tel point que sa démolition a été envisagée.

Cette possibilité a fait naître l’association de sauvegarde du Temple de Metz-Queuleu. Philippe François et Didier Risser, deux membres de cette association, nous ont ouvert les portes de cet édifice figé dans le passé.

Un édifice datant de l’annexion de l’Alsace-Moselle

Pour comprendre l’importance de l’édifice, il faut retracer son histoire. Celle-ci a débuté avec l’annexion de l’Alsace-Moselle par l’empire allemand. Une période charnière où une forte immigration de confession protestante a eu lieu mais pendant laquelle les édifices cultuels manquaient.

C’est pour répondre à cette problématique qu’en 1904 le temple de Queuleu a été construit par l’architecte Ludwig Levy de Karlsruhe grâce à la participation financière de l’empire allemand, Guillaume II mais aussi aux dons de citoyens.

Le temple fait partie du patrimoine impérial de Metz

Un symbole de l’annexion qui se ressent dans l’aspect extérieur du temple : « Cette architecture remarquable marie deux pierres, le grès d’Alsace et la pierre de Jaumont de Moselle », explique Philippe François.

Et au même titre que la gare de Metz ou encore l’ancien hôtel des Postes, le temple de Queuleu fait partie du patrimoine impérial issu de l’annexion, rappelle Didier Risser : « Peu de villes ont ce style. On ne le retrouve guère ailleurs en dehors de Strasbourg. Sur Queuleu, il y a assez peu de témoignages de ce style ».

Par ailleurs, le temple de Queuleu est doté d’un séquoia haut de 20 mètres et d’une circonférence de 5,25 mètres : « Un élément remarquable », souligne Didier Risser. Sans compter qu’une partie du parc de l’édifice, où se trouve cet arbre, est classé en espace boisé remarquable : « C’est une partie inconstructible ».

La démolition du temple envisagée pour construire des logements

Toutefois, cet édifice a failli disparaître. Depuis plusieurs années, le temple de Queuleu n’est plus utilisé pour le culte alors le consistoire, propriétaire du bâtiment, se retrouve avec une charge qui ne lui est plus d’aucune utilité mais avec d’autres charges nécessitant des financements.

Alors en 2022, le consistoire envisage de vendre l’édifice et des promoteurs montrent de l’intérêt, relate Philippe François : « Les citoyens se sont émus de ça et ont créé l’association de sauvegarde et de mise en valeur du temple pour freiner ce projet car il aboutissait à la destruction du temple pour reconstruire après des logements ».

Une émotion tellement forte que l’association a fédéré plus de 500 membres en l’espace d’un an. « On voit le temple de Queuleu depuis le centre Pompidou et la gare. C’est une image qui, si elle disparaît, déstabiliserait les habitants. Cette déstabilisation a été grande quand l’horloge du temple s’est arrêtée à la suite d’un orage », précise Philippe François.

Une dimension cultuelle et culturelle au sein du temple ?

Face à la situation, l’association a rencontré la municipalité avec le consistoire. « L’objectif était de trouver des solutions. Les discussions ont été constructives », assure Philippe François.

À ce stade, si les discussions sont en cours, une piste est privilégiée avec une dimension culturelle et cultuelle, « un peu à l’instar de ce qu’il s’est fait à Strasbourg où un temple protestant n’avait plus d’utilité cultuelle mais a été aménagé pour en faire un tiers-lieu », nous explique-t-on. Également, la municipalité s’est engagée à inscrire dans le PLUi (Plan local d’urbanisme intercommunal) l’extension d’espace boisé protégé à l’ensemble du parc, selon Didier Risser.

La sauvegarde du patrimoine historique ? Une « priorité » pour la Ville de Metz

Dans son bilan de mi-mandat à l’automne 2023, la municipalité a rappelé que « la sauvegarde et la rénovation du patrimoine historique messin » est une « priorité du mandat ».

Une volonté qui s’est concrétisée par de nombreuses actions, selon la Ville : « la réhabilitation de l’aile ouest du Cloître des Récollets, les travaux de l’aile programmés en 2024 », « la restauration des fresques de l’église Saint-Eucaire » ou encore « la préservation du temple de Queuleu menacé de démolition par un projet de construction ».

« Il faut redonner vie à cet édifice »

Pour l’association de sauvegarde du temple de Queuleu, « il faut redonner vie à cet édifice » dont l’ensemble est « plutôt en bon état ».

« Nous avons fait des propositions dans le sens de réutilisation en utilisation culturelle, sportive… Des tas de choses pourraient être faites : nous avons un orgue qui pourrait servir à une école de musique, d’autres activités cherchent aussi de l’espace. Nous avons fait des propositions en ce sens. Nous ne pouvons pas intervenir sur le culte », ajoute Philippe François.

Outre des projets sur le long terme, l’association envisage un événement particulier à la fin de l’année 2024 : l’anniversaire des 120 ans de la construction. Philippe François donne quelques précisions : « Avec l’accord du consistoire, l’association souhaite faire une manifestation sur place. Nous avons quelques pistes, quelques animations qui pourraient être faites. L’idée serait également de le faire pour les journées du patrimoine ».

Si l’édifice reprenait vie, l’association aimerait symboliquement marquer le coup par la remise en marche de l’horloge.

Des démarches pour classer le temple aux Monuments historiques

Une autre démarche est également en cours pour protéger le temple de Queuleu : s’il est un élément remarquable, l’édifice n’est pas classé au titre des Monuments historiques, c’est pourquoi des démarches ont été lancées en ce sens, selon Philippe François.

« Avec l’association de renaissance du vieux Metz, nous avons engagé une démarche dans le but de protéger le temple au titre des Monuments historiques. En octobre 2023, une première commission à la Drac (Direction régionale des affaires culturelles, NDLR) Grand Est a affirmé qu’il y avait un intérêt pour poursuivre la démarche ».

Un retour du projet de démolition ? « L’association est vigilante »

Les démarches sont en cours mais peuvent prendre du temps. Toutefois, tant que l’instruction n’est pas terminée, la destruction du bâtiment ne peut pas être actée.

Pour l’heure, l’idée de démolition du temple est suspendue : « Pour autant, si aucun débouché n’est trouvé, je pense que cette idée va revenir, estime Philippe François. C’est pour cette raison que l’association est vigilante pour éviter un désagrément qui est peu probable mais qui peut toujours arriver. »